Actualité juridique et statutaire
13 Octobre 2023
Dans une décision en date du 19 juillet 2023 (n°462834), le Conseil d’Etat apporte des précisions sur la réparation des préjudices subis par un fonctionnaire dont la réintégration à l’issue d’une disponibilité est illégalement refusée.
La décision rendue par le Conseil d’Etat vient préciser les principes généraux du droit qui régissent la responsabilité des personnes publiques.
Principe
un agent public irrégulièrement évincé a droit à la réparation intégrale du préjudice qu’il a effectivement subi du fait de la mesure illégalement prise à son encontre (Conseil d’Etat, 06/12/2012, n°365155).
Exception
Une exception à l’indemnisation intégrale est prévue lorsque l’agent n’a pas demandé l’annulation de la décision d’éviction. Dans ce cas, l’indemnisation est forfaitaire (et non plus intégrale), puisqu’il est alors impossible de fixer une date objective limitant le droit à indemnité à la date d’annulation de la décision illégale (Conseil d’Etat, 22 septembre 2014, n° 365199).
L'apport de l'arrêt du 19 juillet 2023
Dans sa décision du 19 juillet 2023, le Conseil d’Etat a d’abord estimé que les décisions de refus de réintégration prises par l’employeur les 21 mars et 18 juillet 2016 sont illégales au motif que l’employeur était tenu de proposer à l’agent les éventuels postes vacants correspondant à son grade, quand bien même l’agent avait demandé sa réintégration par anticipation. Or en l’espèce, l’employeur n’a pas pu établir l’absence d’emploi vacant correspondant au grade de la fonctionnaire. Ce n’est que le 4 avril 2017 que l’employeur a proposé à l’agent un poste correspondant à son grade avec effet au 1er juin 2017, poste refusé par la fonctionnaire.
Après avoir constaté l’illégalité des décisions prises par l’employeur, le Conseil d’Etat a précisé les modalités d’indemnisation de la fonctionnaire au titre des préjudices subis.
Le juge a retenu que, quand bien même l’agent n’a pas demandé l’annulation des décisions de refus de réintégration (ce qui aurait dû la priver d’une réparation intégrale du préjudice), la réparation forfaitaire ne peut être retenue en l’espèce dès lors qu’il est possible de dater avec précision la survenance de l’illégalité (= les décisions de refus de réintégration des 21 mars et 18 juillet 2016) et la cessation du préjudice qu’il en résulte (= le 1er juin 2017, date d’effet du poste proposé et refusé par l’agent). La fonctionnaire a donc droit à une réparation intégrale des préjudices subis du fait des décisions de refus de réintégration illégales jusqu’au 1er juin 2017.
Consulter ici l’intégralité de l’arrêt.
En vertu des principes généraux qui régissent la responsabilité des personnes publiques, l'agent public placé en position de disponibilité a droit à la réparation intégrale des préjudices de toute nature qu'il a effectivement subis du fait du refus illégal de faire droit à sa demande de réintégration et présentant un lien direct de causalité avec l'illégalité commise, y compris au titre de la perte de la rémunération à laquelle il aurait pu prétendre, à l'exception des primes et indemnités seulement destinées à compenser des frais, charges ou contraintes liés à l'exercice effectif des fonctions et déduction faite, le cas échéant, du montant des rémunérations que l'agent a pu se procurer par son travail au cours de la période d'éviction. Il est, le cas échéant, tenu compte des fautes commises par l'intéressé. Lorsque les préjudices causés par cette décision n'ont pas pris fin ou ne sont pas appelés à prendre fin à une date certaine, il appartient au juge de plein contentieux, forgeant sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties, de lui accorder une indemnité versée pour solde de tout compte.